L’étape suivante est franchie en Angleterre par William Huggins (1824-1910), un astronome amateur fortuné qui est un pionnier de la spectroscopie astronomique. Comparant le spectre de la comète 55P/Tempel-Tuttle avec celui de différents produits qu’il observe au laboratoire, il identifie les bandes découvertes par Donati à celles de molécules contenant du carbone (en fait le dicarbone C2).
Obtenant en 1881 des spectres plus détaillés d’une autre comète, il y retrouve les raies solaires de Fraunhofer, ce qui confirme l’observation d’Arago selon laquelle la lumière de la comète est principalement de la lumière solaire diffusée, mais affectée par des émissions propres à la comète.
Les années suivantes verront ces idées se préciser lentement. Les spectres de comètes s’accumulent alors que des travaux de laboratoire caractérisent l’émission de nombreuses molécules nouvelles. L’identification des bandes observées dans les spectres cométaires progresse. C’est ainsi que le cyanogène CN est découvert dans la grande comète C/1881 K1 ; il est à nouveau observé dans la comète de Halley au siècle suivant.
Le célèbre vulgarisateur Camille Flammarion (1842-1925) va le divulguer, ce qui provoque un début de panique : pendant la nuit du 18 au 19 mai 1910, date à laquelle la Terre doit passer dans la queue de la comète, les gens craignent d’être victimes de ce poison violent. Flammarion a beau démentir la rumeur, c’est trop tard ! Mais, bien entendu, rien ne se passe.
Après de nombreux tâtonnement, les scientifiques ont fini par comprendre que la coma et queue principale des comètes contiennent des poussières, et que ce sont elles qui diffusent la lumière du Soleil. Elles sont poussées par la pression de radiation exercée par les photons solaires qui les frappent, un mécanisme découvert par le grand physicien anglais James Clerk Maxwell (1831-1879). La coma et la queue contiennent aussi du gaz, où l’on a repéré les molécules C2, C3, CN et CH.
Reste à savoir ce qu’il y a à l’intérieur de la coma. C’est ce que découvrira la sonde Giotto en 1986 : un noyau de glace et de poussières.