Les instruments

L’observation des comètes dans l’Antiquité et au Moyen-Âge

Les instruments de l’astronomie antique et médiévale sont peu nombreux. La sphère armillaire et l’astrolabe servaient à mesurer la position des astres par rapport aux étoiles brillantes et aussi de calculateur analogique pour transformer leurs coordonnées angulaires terrestres (azimut et hauteur ou distance zénithale) en coordonnées angulaires célestes (ascension droite et déclinaison, ou longitude et latitude écliptiques). Plus précis, le bâton de Jacob apparu au XIVe siècle servait à mesurer la distance angulaire entre deux astres.

Les instruments de Tycho Brahe

Le grand astronome danois Tycho Brahe (1546-1601) a considérablement perfectionné les instruments astronomiques existants et en a inventé de nouveaux. Ils permettaient dans les meilleurs cas de mesurer la position des astres avec une précision de l’ordre de 2 minutes d’arc, contre près d’un degré antérieurement. Les comètes étaient repérées sans instrument, mais Tycho Brahe pouvait ensuite mesurer leur position avec précision par rapport aux étoiles voisines. C’est ainsi qu’il a pu établir pour la première fois, sur la comète C/1577 V1, que les comètes sont plus distantes que la Lune.

Ce quart-de-cercle, le quadrans maximus, tourne autour d’un axe horizontal, en haut. On observe l’astre avec le système de visée attaché au bord droit du quart-de-cercle, et on lit sur les graduations du cercle, derrière le fil à plomb, sa distance angulaire au zénith. Le principe de cet instrument, qui est bien plus précis que le bâton de Jacob, a été repris pour la plupart des instruments de mesure de la position des astres au cours des XVIIe et XVIIIe siècles.

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Quart de cercle de Tycho Brahe, d’après son Astronomiae instauratae mechanica, 1598.

Crédit : Observatoire de Paris

L’observation des comètes aux XVIIe et XVIIIe siècles

Certes, les lunettes astronomiques font leur apparition au début du XVIIe siècle, mais elles sont totalement inadaptées à la recherche des comètes, qui se fait toujours à l’œil nu : elles sont très longues, donc peu maniables, peu lumineuses et leur champ est petit. Cependant, une fois une comète découverte, il faut mesurer sa position. On utilise généralement pour cela le quart de cercle, dérivé du quadrans maximus de Tycho Brahe mais muni d’une ou deux lunettes. C’est l’instrument astronomique et géodésique le plus utilisé, et de loin.

Cependant, l’apparition au XVIIIe siècle du télescope à miroir et de la lunette achromatique va changer la situation : ces instruments maniables et à champ assez grand peuvent être utilisés pour la recherche des comètes, et c’est ainsi que procèdent les grands découvreurs comme Messier, Pons ou Caroline Herschel.

La position des comètes est toujours mesurée au quart de cercle, maintenant souvent muni d’un cercle divisé azimutal.

L’observation des comètes au XIXe siècle

Au XIXe siècle encore, la recherche des comètes se fait toujours à l’œil nu ou avec de petites lunettes ou télescopes. On utilise aussi les jumelles inventées dès le XVIIe siècle mais enfin rendues pratiques. Et un instrument spécialisé apparaît : le chercheur de comètes. Il s’agit d’une lunette dont la monture est conçue pour que l’observateur n’ait pas à se déplacer pour viser différentes régions du ciel, mais seulement à tourner la tête. Dans les deux cas, la tête de l’observateur se trouve à la croisée des deux axes perpendiculaires de la monture équatoriale (un des axes est parallèle à l’axe de rotation de la Terre, ce qui permet de suivre le mouvement des astres par une simple rotation autour de cet axe. Il semble cependant que cet instrument n’ait pas eu le succès escompté. Le chercheur de comètes installé en 1866 à l’Observatoire de Marseille a disparu mais un exemplaire semblable subsiste à l’Observatoire de Strasbourg.

Pour mesurer la position des comètes, on n’utilise plus le quart-de-cercle mobile du siècle précédent, mais les nouveaux instruments de l’astrométrie comme les instruments réalisés par Henri Prudence Gambey (1787-1847) à l’Observatoire de Paris.

Le cercle mural, instrument aujourd’hui disparu, fut construit en 1843. Fixé à un mur nord-sud, il permettait de connaître l’instant du passage des astres au méridien et leur hauteur au dessus de l’horizon à cet instant. Une autre réalisation intéressante, mais semble-t-il unique, est l’équatorial qu’il construisit en 1826. Il comporte une lunette de 10 cm de diamètre sur une monture équatoriale, dont les deux cercles gradués perpendiculaires de 1 m de diamètre permettaient d’obtenir directement la position de l’astre visé. Cet instrument a également disparu.

L’heure est maintenant à l’étude physique des comètes. Le premier instrument utilisé à cet effet est le polarimètre d’Arago, avec lequel celui-ci a découvert la polarisation de la lumière des comètes, indiquant qu’il s’agit essentiellement de lumière solaire diffusée.

La spectroscopie des comètes est désormais possible. Les spectroscopes visuels, puis photographiques, sont fixés au foyer des lunettes ou des télescopes, comme c’est le cas par exemple sur la lunette de 20 cm de diamètre de Sir William Huggins, installée dans son observatoire privé de Tulse Hill près de Londres. A l’extrémité inférieure du tube, il a placé un spectroscope avec lequel il a observé visuellement puis par photographie le spectre des planètes, des comètes et des étoiles ; la batterie au sol et les fils alimentent une bobine de Ruhmkorff dont les étincelles qui fournissent le spectre de différents produits, qu’Huggins compare aux spectres astronomiques. Les premiers bons spectres de comètes ont été obtenus avec cet instrument, d’abord visuellement en 1868 puis par photographie en 1881.

L’observation des comètes du XXe siècle à aujourd’hui

La photographie astronomique a commencé à se répandre chez les astronomes professionnels dans les dernières décennies du XIXe siècle, un peu plus tard chez les amateurs. Elle a rendu possible la découverte et l’observation des comètes par photographie, surtout quand des dispositifs optiques à grand champ ont été construits, que ce soient des objectifs à lentilles ou des télescopes spécialisés comme celui inventé par Bernhard Schmidt (1879-1935) en 1930. Mais professionnels et amateurs (souvent très bien équipés) continuent à utiliser des jumelles plus ou moins puissantes, des petites lunettes ou de petits télescopes, ceux-ci étant aujourd’hui souvent munis de caméras CCD. Il existe aussi des programmes d’imagerie systématique du ciel par des télescopes robotisés, qui permettent de nombreuses découvertes de comètes ou d’astéroïdes. Ils fournissent en même temps la position des comètes par rapport aux étoiles du champ.

Comète C/1970 Y1 Bennett

La comète Bennett photographiée le 1er avril 1970 à l’Observatoire de Haute-Provence.

Crédit : Observatoire de Haute-Provence / CNRS