D’où viennent les comètes

Pour répondre à cette question, il faut reconstituer l’orbite des comètes avant qu’elles ne pénètrent pour la première fois dans l’intérieur du Système solaire, disons à une trentaine d’unités astronomiques du Soleil, donc avant que les perturbations par l’attraction gravitationnelle des planètes les plus massives ne se fassent sentir. C’est un problème difficile, car on ne découvre les comètes nouvelles que lorsqu’elles sont assez proches de nous, c’est-à-dire après que leur orbite ait été perturbée : il faut donc évaluer ces perturbations et remonter, par le calcul, à l’orbite initiale. À partir de 1914, l’astronome suédo-danois Elis Strömgren (1870-1847) et ses collègues ont montré que cette orbite initiale est en fait une ellipse très allongée et donc qu’elles ne viennent pas de l’infini. Partant de cette idée, un astronome estonien très imaginatif, Ernst Öpik (1893-1985), a évoqué en 1932 l’existence d’un « réservoir de comètes » situé à plus de 10 000 unités astronomiques du Soleil. L’hypothèse d’Öpik est à la base du travail définitif du Hollandais Jan Hendrik Oort (1900-1992). Utilisant les orbites initiales calculées par différents auteurs, Oort a montré en 1950 que leur aphélie (le point où elles sont le plus loin du Soleil) se trouve dans une coquille sphérique épaisse de rayon compris entre 50 000 et 150 000 unités astronomiques (u.a.).

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Orbites de quelques comètes connues en 1887, avec pour comparaison l’orbite des planètes Ces comètes sont périodiques, à l’exception des comètes C/1729 P1 et C/1853 L1. Il y a sensiblement autant de comètes à mouvement direct (comme celui des planètes) qu’à mouvement rétrograde. D’après Les Comètes / Guillemin, 1887.

Crédit : Observatoire de Paris

De temps en temps, une perturbation gravitationnelle entraîne ces comètes vers le Système solaire. Oort pensait que cette perturbation était liée au passage d’une étoile proche. On pense aujourd’hui que ce sont les ondes de densité 1qui parcourent notre Galaxie qui perturbent le nuage de Oort et en expulsent des comètes, plutôt que l’action gravitationnelle des étoiles. Les objets qui peuplent ce réservoir se sont probablement formés au niveau des orbites d’Uranus et de Neptune, et ont été par la suite projetés aux confins du Système solaire suite aux perturbations gravitationnelles dues à Jupiter et Saturne…

Les scientifiques ont également identifié un autre réservoir de comètes, beaucoup plus proche que le nuage de Oort mais néanmoins situé au-delà de l’orbite de Neptune : la ceinture d’astres glacée de Kuiper, située entre 30 et 55 unités astronomiques du Soleil.

  • 1. Les ondes de densité sont des zones de compression à très grande échelle de la matière. Ce sont elles qui forment les bras de spirale de nombreuses galaxies, dont la nôtre.
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En résumé, il y a donc trois types de comètes, issues de deux grands réservoirs.

Certaines comètes nouvelles nous arrivent d’un réservoir très éloigné, le nuage de Oort ; leur orbite est une ellipse extrêmement allongée, presque une parabole, et leur direction d’arrivée est quelconque.

D’autres nous parviennent d’un réservoir plus proche, la ceinture de Kuiper : elles ont aussi des orbites sensiblement paraboliques mais elles sont relativement proches du plan de l’écliptique, où circulent les planètes.

Enfin, les comètes périodiques rassemblent des comètes des deux réservoirs précédents : leur trajectoire a subi des perturbations gravitationnelles de la part de Jupiter et de Saturne, et leur orbite est une ellipse plus ou moins allongée. Certaines de ces comètes, « capturées » par Jupiter et dites « de la famille de Jupiter », gravitent plus près du Soleil que cette planète, à moins de 5 unités astronomiques du Soleil avec des périodes inférieures à la dizaine d’années : la comète de Encke est le prototype de cette classe. Leur orbite est peu inclinée sur l’écliptique car elles proviennent surtout de la ceinture de Kuiper. Étant passées de multiples fois à proximité du Soleil, elles ont perdu une bonne partie de leur réserve de glace sous l’effet de l’augmentation de température, et elles sont généralement peu actives et donc peu brillantes. D’autres comètes, dites de la famille de Halley, ont des périodes comprises entre 20 et 200 ans et des inclinaisons parfois élevées ; elles proviennent généralement du nuage de Oort. Les comètes du nuage de Oort sont aujourd’hui les plus connues ; elles peuvent être très brillantes, comme la comète de Halley en 1910 ou la comète C/1995 O1 Hale-Bopp en 1997.

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Orbites de quelques comètes à courte période, « capturées » par le champ gravitationnel de Jupiter. Ce sont des comètes dites « de la famille de Jupiter ». Les deux cercles labellisés « orbite de Jupiter » ont pour rayon la distance au périhélie et à l’aphélie (le point le plus éloigné du Soleil). D’après L’Astronomie populaire / Flammarion, 1880.

Source : James Lequeux