Cette dimension symbolique se retrouve dans de nombreuses œuvres. Un traité d’astrologie babylonien de la fin du 1er millénaire avant J.-C. consacre déjà une tablette aux « bibbu », les astres errants, comètes, planètes et étoiles filantes, qui se déplacent dans le ciel. Parfois spectaculaire, pendant longtemps inattendue, la comète est forcément présage. Elle constitue donc un signe, positif ou négatif suivant le propos de l’œuvre, qui renforce le message ou la signification qu’elle entend porter.
C’est ainsi comme un présage heureux qu’elle accompagne L’Adoration des mages de Giotto car l’étoile de la Nativité prend souvent la forme d’une comète, annonciatrice d’un grand évènement. Inversement, elle peut être de sinistre augure comme dans l’arrestation du Christ de Lorenzetti car elle est aussi présage de mort.
L’impact des comètes est tel que certains artistes semblent utiliser des scènes religieuses, mythologiques ou historiques pour immortaliser leur apparition. Ainsi Dominicus Van Wijnen, un peintre hollandais du 17e siècle, insère dans la Métamorphose d’Eson qu’il peint en 1661 à Amsterdam la comète Ikeya-Zhang observée cette année-là et mentionnée notamment par l’astronome polonais Hevelius.
Le graveur Jiri Daschitzky place en revanche la grande comète de 1577 passant au-dessus de Prague au centre de la représentation : elle occupe non seulement tout l’espace du ciel mais elle donne aussi sa forme à la plume que tient le personnage central, consignant peut-être son observation.
Plus ambiguë est la comète qui apparait dans la célèbre gravure de Dürer, Melencolia I, datée de 1514. De nombreux commentateurs ont voulu y voir un « satellite sombre » concourant à la dimension apocalyptique de l’œuvre car la comète est un des phénomènes célestes annonciateurs de la fin des temps ou de la mort. D’autres y voient la trace de la comète que Dürer a effectivement observée en février 1514 et qu’il mentionne dans ses notes.
La symbolique apocalyptique de la comète la fait associer tardivement au Déluge qu’elle aurait précédé et annoncé, quoi que la Bible ne mentionne rien de tel. Cette association perdure jusqu’au XXe siècle, puisqu’on la trouve encore dans le tableau de John Martin (1789-1854), The Eve of the Deluge (1840) ou dans celui de Ludwig Meiner (1884-1966), Apokalyptische Landschaft (1912-1913).
C’est précisément cette dimension apocalyptique qui fera le bonheur des caricaturistes au XIXe siècle. Honoré Daumier moque par exemple dans Le Charivari le retour annoncé par l’astronome Jacques Babinet (1794-1872) de la comète dite de Charles-Quint, -l’empereur y avait vu en 1556 une confirmation de son désir d’abdication- , qui finalement ne reviendra pas…
Mentionnons enfin des œuvres contemporaines où la trajectoire de la comète et le découpage sériel qu’elle permet est une source d’inspiration. La comète de Chagall occupe six vitraux de la cathédrale de Metz. Jan Dibbets, dont l’œuvre Hommage à Arago est installée à l’Observatoire de Paris et dans toute la capitale depuis 1994, a conçu dès 1973 une œuvre intitulée Comet, 6-72°, Sky-Land-Sky qui montre un montage de 12 photographies figurant une comète épurée, réduite à sa queue (Paris, centre-Pompidou-Musée national d’art moderne-Centre de création industrielle). Enfin c’est une comète que choisit Jean Cortot pour illustrer le poème de Jean Tardieu Les Phénomènes de la nature (Paris, Maeght, 1988) dans un leporello, ou livre-accordéon, qui permet de cheminer dans sa chevelure.
Voir aussi > les comètes dans la littérature